lundi 15 décembre 2014

Dix arts ?

la Gazette des arts …n’en aborde que deux ou trois … !


On parle couramment de 7ème art s’agissant du cinéma. Il y en a donc six avant ? Y en a-t-il après ? Question (saugrenue) me direz-vous. Alors, combien d’arts en réalité, et en existe-t-il un dixième ?

YES !

Les grecs de l’Antiquité n’ont pas eu ni le concept ni le mot correspondant à «art», mais distinguaient parmi certaines activités, appelées « tekhne », celles qui étaient parrainées par les Muses, dont le nombre a fini par se stabiliser à neuf, comme les neuf muses dont je vous ai déjà parlé, après les avoir cherchées (et trouvées-presque) au Prado à Madrid (1) :

Calliope : la poésie épique ; Clio : l’histoire ; Érato : la poésie érotique et lyrique ; Euterpe : la musique ; Melpomène : la tragédie ; Polymnie : la pantomime, la rhétorique et les chants religieux ; Terpsichore : la danse et le chant choral ; Thalie : la comédie  ; et Uranie : l’astronomie et la géométrie.

Melpomene à Washington
Ces activités artistiques sont toutes liées aux lettres, aux langages musicaux ou gestuels, mais pas aux arts plastiques (architecture, peinture, ...). Naturellement celui qui apparait aujourd’hui comme le septième art n’existe pas encore, et d’autres sont regroupés sous d’autres rubriques.

Au Moyen Âge, les arts libéraux sont au nombre de sept, classés en deux groupes :

-le trivium (les sciences du langage, mais correspondant plutôt à notre philosophie actuelle) : rhétorique, grammaire et dialectique ;

-le quadrivium (les sciences des nombres) : arithmétique, géométrie, astronomie et musique.

-Les arts mécaniques (ça je kiffe, ce sont les activités manuelles) désignaient, outre les activités qui seront regroupées comme les Beaux-Arts (l’architecture, la sculpture, la peinture et l’orfèvrerie), toutes les activités qui transforment de la matière, celles qui relèvent des sept corps des marchands (qui n'étaient pas de simples négociants mais des fabricants) comme la draperie, l'épicerie dont relèvent les apothicaires, l'orfèvrerie, la mercerie, etc., ainsi que beaucoup d'autres qui relevaient d'autres catégories comme la sidérurgie, la verrerie, la coutellerie, etc.

Hugues de Saint-Victor, au XIIe siècle énumère les sept sciences mécaniques : filage, architecture, navigation, agriculture, chasse, médecine, théâtre.

Les nobles arts (activités propres à la noblesse, à leur apprentissage et à leur perfectionnement) désignaient le maniement des armes, les arts martiaux, l'équitation, la chasse, les jeux nobles comme la paume, la danse, le cérémonial, la quintaine, la stratégie, les échecs, etc…

Pendant la Renaissance italienne, le mot Arte (pluriel Arti, on comprend l'origine de la chaîne de télévision du même nom), désigne encore l’ensemble des gestes précis concernant une pratique maîtrisée (un métier) entre la science théorique et la pratique spontanée. Mais, avec la naissance de la notion d’artiste signant ses œuvres et reconnu comme tel, il prend le sens plus moderne de Beaux-Arts.

L’arte del disegno (qui n'est pas encore le design)regroupe à cette époque les arts du volume (sculpture, architecture) et ceux de la surface (dessin, peinture, gravure), opposition que l’on retrouvera étymologiquement dans les expressions « arts plastiques » et « arts graphiques ». Le point commun de ces pratiques manuelles étant alors l’action sur la matière.

Poursuivons notre marche forcée au travers des siècles : Emmanuel Kant, en 1790, propose de distinguer trois catégories d'art  :


-les bildenden Künste (dérivé du substantif Bild, signifiant "image", et du verbe bilden, qui signifie «former»), soit « les arts de l'expression des Idées dans l'intuition des sens », comprenant la sculpture et l'architecture (die Plastik) ainsi que la peinture (Malerei) ;

-les redenden Künste, soit les arts de la parole, comprenant l'éloquence et la poésie ;

-le Kunst des schönen Spiels der Empfindungen, soit l'art du beau jeu des sensations, comprenant la musique et l'art des couleurs (Farbenkunst).
Dès le XVIIIe siècle, on ne se contente plus de donner une liste des arts, mais on cherche à élaborer leur système. En poursuivant ce but, la plupart des auteurs vont contre le sens commun, et selon leurs besoins amalgament, ignorent ou différencient. Au début du XIXe siècle, adoptant cette manière philosophique dans ses cours d’esthétique donnés entre 1818 et 1829, Hegel distingue cinq arts. Il les classe en fonction de deux critères : l’expressivité et la matérialité. Ainsi il organise une double échelle allant de l'art le moins expressif mais plus matériel à l'art le plus expressif mais le moins matériel. Cela donne :

l’architecture ;
la sculpture ;
la peinture ;
la musique ;
la poésie.

« Ces cinq arts forment le système déterminé et organisé des arts réels. En dehors d’eux, il existe, sans doute, encore d’autres arts, l’art des jardins, la danse, etc. Mais nous ne pourrons en parler que d’une manière occasionnelle. »

Nous arrivons au XXème siècle !

Aux cinq arts communément cités au XIXe siècle, le XXe va en rajouter quatre autres pour arriver à un total de neuf arts sans pouvoir se mettre d’accord sur un 10e art.





















La liste suivante se trouve bien établie et stabilisée à neuf, à l’image du nombre des Muses antiques :

1er art : l’architecture ;
2e art : la sculpture ;
3e art : les « arts visuels », qui regroupent la peinture et le dessin ;
4e art : la musique ;
5e art : la littérature, qui inclut la poésie ;
6e art : les « arts de la scène », qui regroupent le théâtre, la danse, le mime et le cirque 
7e art : le cinéma ;
8e art : la photographie ;
9e art : la bande dessinée.

Prenant parti pour la tradition et le sens commun, des auteurs ajoutent à la liste du XIXè siècle la danse, qu’ils conçoivent de façon élargie, y incluant l’art du mime et tout art scénique, dont le théâtre.

7è art : le cinéma ;

Ricciotto Canudo défend dès 1908 le cinématographe lorsqu’il écrit (en italien) Triomphe du Cinématographe, repris en 1911 en français dans La Naissance d’un sixième art. Essai sur le Cinématographe. À ce moment-là, il voulait faire du cinématographe le 6e art, celui qui ferait la synthèse des « arts du temps » (la musique et la poésie) et les « arts de l’espace » (l’architecture, la sculpture et la peinture). Apprenant que la danse, le mime, le théâtre et le cirque pouvaient être regroupés en « arts corporels », il imagine le cinématographe comme le 7e art. En 1922, il fonde La Gazette des sept arts, une des premières revues de critique cinématographique, il y publie, en 1923, un Manifeste du septième art qui, à la suite des efforts déjà déployés par Guillaume Apollinaire, Abel Gance, Maïakovski, Meyerhold, Colette et les futurs surréalistes ou le critique Louis Delluc, contribue à élever le cinéma au statut d’un art.

8è art : radio, télévision ou photographie.

Hans Hartje décrit la radio, en la qualifiant d’art et d’essais, comme un 8e art dans un livre très laudatif. Déjà en 1941, Roger Clausse publiait La Radio, huitième art. La télévision est aussi considérée comme le 8e art. En 1961, le prince Rainier de Monaco crée une manifestation consacrée, selon ses dires, uniquement au 8e art, le Festival de télévision de Monte-Carlo. Un éditeur spécialisé dans ce média porte le nom Huitième Art, il publie nombre de livres sur des émissions ou feuilletons culte de la télévision.

En 1982, le ministère de la culture crée le Centre national de la photographie pour aider et mettre en valeur le 8e art.

Certains auteurs, principalement canadiens, font une synthèse de ces trois arts sous le nom d’« arts médiatiques ». Il existe à Montréal le CIAM - Centre Interuniversitaire des Arts Médiatiques.

9e art : la bande dessinée

Quarante ans après le cinéma, le même processus se répète. En effet, en 1964, Morris et Pierre Vankeer décident de publier chaque semaine dans le journal Spirou une série d’articles sur l’histoire de la bande dessinée. Ils envisagent dans un premier temps de titrer cette rubrique le Huitième Art, mais des techniciens du journal signalent aux auteurs qu’il existe déjà un 8e art : la télévision, alors en plein développement. Dans le premier article paru sous le titre Neuvième Art, musée de la bande dessinée, il reste une trace de cette hésitation : « Les bandes dessinées sont nées avant le cinématographe de MM. Lumière. Mais on ne les a guère prises au sérieux pendant les premières décennies de leur existence, et c’est pourquoi la série d’articles qui débute aujourd’hui s’appellera 9e Art. »
la zorglumobile anticipe avec brio les drones

Cette phrase qui a perdu tout son sens, le retrouve si l’on remplace dans la phrase 9e par 8e art. Souvent la création du 9e art est attribuée à Francis Lacassin, auteur du livre Pour un neuvième art, la bande dessinée, mais ce livre ne date que de 1971, 7 ans après les articles de Spirou. Précisons toutefois que Morris n'a jamais considéré la bande dessinée comme étant un art (majeur ou mineur). C'est en apprenant que le cinéma était devenu le "7ème art" qu'il a déclaré, mi-moqueur, mi-agacé, mais avec l'esprit caustique et sarcastique qui le caractérisait: si le cinéma est le 7e art, alors la bande dessinée est le 8ème! (devenu 9ème... art une fois Morris informé que la télévision était considérée comme le 8e art). Lorsque les journalistes lui parlaient de 9e art concernant la bande dessinée Morris se mettait facilement en colère et rappelait volontiers le ridicule (à ses yeux) de cette appellation. Pour Morris il n'existait en tout et pour tout que 6 arts majeurs.

Rencontres d'Arles 2007 : on est en plein dans l'art contemporain.

Un 10ème art ?

Il n’y a pas de consensus sur la désignation d’un 10e art actuellement, cependant, diverses activités artistiques ou ludiques sont revendiquées avec ce titre, dont notamment les arts numériques, le jeu de rôle, le jeu vidéo, le modélisme (et par extension, ce qui tourne autour du maquettisme…Ouf ! !), l’art culinaire et la gastronomie(YES), l'art de la table, le graphisme ou arts graphiques ; la calligraphie, la parfumerie, l'humour (belge), l'origami, le tatouage etc.

typiquement de l'art mécanique, subtile nuance avec la mécanique d'art
Mais la majorité des gens s'accordent a dire que le 10ème art est le jeu vidéo , comme la Court Suprême des États Unis qui valide officiellement ce choix dans le droit Américain en 2012.

Vous avez compris que l’Art contemporain n’est pas un seul des dix Arts, mais les englobe tous du moment qu’il est de l’époque donc contemporain of course. Turner dont on a vu le  film hier était contemporain quand il a inventé l’impressionnisme. Anciens et modernes se succèdent au fil du temps !




L’Art est protéiforme, et ne concerne pas uniquement

les sept premiers (arts)

n’oublions pas les trois autres !

Il y en a en tout dix !


Dix Arts … comme c’est …Bizarre ?


toute femme normalement constituée vous dira qu'un (très beau) sac
est l'accessoire incontournable de l'art de vivre !
pareil pour les accessoires dont les chaussures, ici le H d'Hermès


comme il y a l'art des jardins, il y a celui des parfums