mardi 17 juin 2014

C6 Lictoria sex


sex = 6 : la Citroën de Pie XI (1)

Une vraie italienne !

à sa main droite, le Saint-Père peut pianoter les ordres au chauffeur.
Derrière lui à droite, un cierge électrique (12 volts !)

Le Pape Pie X (1903-1914) s’était vu offrir, en 1909, par Monseigneur Farlen, évêque de New York, une voiture américaine, Lune Graham-Paige. Pourtant, elle ne fut jamais utilisée, pas plus d’ailleurs que les deux autres véhicules qui lui furent offerts ensuite. C’est donc son successeur, le Pape Pie XI (1922-1939) qui, le premier, abandonna complètement l’utilisation des voitures à cheval pour faire sa toute première sortie en Italie, le 22 décembre 1929, avec la Graham-Paige, pour se rendre à la basilique Saint-Jean de Latran.

En juin 1930, la « Societa Italiana di Automobili Citroën» de Milan, filiale italienne de Citroën, lui remit une C6 spéciale, pour commémorer le Latran et le Jubilé de son sacerdoce. Elle fut assemblée dans l’usine milanaise de Via Gattamelata. Son 6 cylindres de 2442 cm3 et 42 chevaux lui permettait d’atteindre la vitesse de 105 km/h.


Construite sur un châssis C6F, elle était déclinée en coupé de ville avec carrosserie et décoration spécifique, et méticuleusement équipée de tous les symboles exigés par l'exercice pontifical, comme la représentation de l'Esprit Saint par une colombe incrustée dans la marqueterie du plafond, et un petit trône situé au fond de la voiture. J’ai dit un trône, mais pas…un trône ! (encore que ?). Plus un porte-brévière et un Saint Christophe portant le Christ enfant symbolisant le patron des chauffeurs.

A l’époque, le mécène ne lésina pas avec les matériaux : des intérieurs en or pur, de prestigieux velours et, l’emplacement du conducteur de couleur rouge amarante avec des mailles d’or.

La C6 LICTORIA SEX , l’ancêtre de la papamobile.

Sa Sainteté Pie XI ne l’a utilisée qu’une seule fois après sa réception le 9 juin 1930 et, il ne s'est assis que deux fois dans la voiture. La deuxième fois, le 12 mai 1936, avec le Conte Bezzi-Scali au volant, soit six ans plus tard pour une ouverture d'exposition. 159 Km ont, ainsi, été parcourus dans l’enceinte du Vatican, dans le seul but de la faire rouler et de faire tourner le moteur.


Aujourd’hui, la voiture est constamment surveillée et un entretien régulier est effectué par des mécaniciens et des spécialistes de la carrosserie. Elle est régulièrement mis en mouvement et roule dans les jardins du Vatican. Depuis 1973, elle est garée au Musée des carrosses du Vatican qui a été institué par le pape Paul VI, et aménagé dans une grande salle en sous-sol du jardin carré. Y sont conservés des carrosses, des selles, des chaises à porteurs et des automobiles utilisés par les différents papes. En particulier la berline de grand gala du pape Léon XII, la Graham-Paige de 1929, et la chaise à porteurs de Léon XIII…



La teinte unique, prune-rouge-violet avec liserés dorés, est régulièrement contrôlée par des spécialistes de peinture historique. La Citroën Lictoria Sex du Pape Pie XI, malgré son faible kilométrage, a dû être restaurée à leur initiative, dans les règles de l’art afin d’en assurer une meilleure conservation. Avec seulement 159 kilomètres au compteur, cette voiture a pourtant traversé presque un siècle d’histoire et, Monseigneur Pietro Amato, directeur des musées historiques du Vatican a été le responsable de cette restauration. C’est le 14 décembre 1992 qu'elle commença pour ce bijou transmis dans le temps et, dont l’histoire est caractérisée par de nombreuses curiosités, et ce depuis sa conception.

C’est l’entreprise Lechler, de Côme, créée il y a 150 ans et, spécialisée dans la couleur des carrosseries automobiles, qui avait en charge la réalisation des peintures. Elle a donc réalisé ce travail en entier avec des produits réalisés sur mesure pour l’occasion et les a fournis à la carrosserie interne du Vatican via le distributeur Colortecnica de Rome.



Le vernis Lechler d’origine a dû être utilisé pour la restauration de la voiture : pour ce faire les opérateurs – maison ont récupéré les informations nécessaires dans leurs archives historiques des voitures de collection afin de permettre une conservation de plus longue durée de la peinture.


Les teintes de finition sont « Bordeaux Citroën » et « Or foncé » pour les liserés. Les laboratoires de R&D de Lechler ont développé un « primer » spécial pour protéger et renforcer sans alourdir le cache-bagages de la « Papamobile » qui présentait des fissures évidentes et pour garder l’authenticité de l’ensemble qui n’aurait pas pu être changé.


Après cette minutieuse œuvre de restauration, elle est prête, flambant neuf, à fêter son centenaire et à se faire admirer par les générations futures au Vatican ou dans les rassemblements d'anciennes pour lesquels elle est aimablement prêtée. Ainsi, cette C6E papale était-elle visible au14° ICCCR à Rome du 15 au 18 juillet 2008.

Cette année, la poste du Vatican a édité un timbre à l’image de cette superbe voiture.



Et bien sûr, la calandre est marquée par un badge de radiateur spécial : 

le fonds est non pas bleu (de France), mais vert (italien), 

avec la signature de la Société italienne d’automobiles Citroën !




(1) C’est une C6, au féminin, licteur (lictorius) donne lictoria. A Rome, (et nous y sommes), les licteurs sont chargés de protéger et d'exécuter les décisions coercitives des magistrats. Leur attribut principal, le faisceau de verges entourant une hache, est leur instrument de contrainte. Le pape, Chef de la cité du Vatican, se doit d’avoir comme aide à ses déplacements une lictrice automobile, une lictoria !