lundi 1 octobre 2012

Ah cette dent (dure)…Odile ! (3è partie)

Hommage à René Larrieu, agriculteur à Malartic...
 ...paléontologue

Souvenirs, souvenirs… ! J’ai habité le Gers, et nous y avons créé notre Paradis (du bonheur dans le pré), et tenté un clône de l’univers d’Hubert Rives, comme je l’évoque dans : http://mesamispapillons.blogspot.fr/2011/03/malicorne-dhubert-rives.html . Naturellement, quand on fait le tour de ce coin Sud du département, nommé par les locaux « le balcon vert des Pyrénées », on finit par tomber sur la commune de Simorre, et à chercher par terre tout caillou susceptible de ressembler à une défense de mastodonte.

Il y avait à Bajon des cèpes merveilleux dans le petit bois de chêne, un hectare de bonheur au milieu du pré. Un nom sur le cadastre extraordinaire : « à la couille » ! Bien sûr cela signifiait : « à la cueille » ! Comme nous n’étions pas présents au moment de l’éclosion, pour cause de boulot à Lyon, les voisins patrouillaient à tour de rôle dans le-dit bois pour surveiller que les étrangers n’y allassent pas. En notre absence, plutôt qu’abandonner une récolte putative aux limaces de la propriété, ils préféraient la récolter pour leur consommation personnelle. Roland le facteur nous donnait acte, par exemple, de ses étrennes annuelles qu’il consommait (en nature) l’été plutôt que les attendre (en maigres espèces) au moment des vœux. On en a fait, des cadeaux en nature, aux Actéons de l’Astarac, comme se nommaient eux-mêmes les chasseurs du coin, en mémoire de leurs ancêtres qui avaient poursuivi Aphrodite avant qu’elles les changeassent en cerfs. Voyez-vous : j’avais envie d’utiliser le subjonctif !

Tout ça pour dire que j’aurais bien entamé des fouilles, mais détruire les cèpes et autres girolles était trop difficile, je ne l’ai pas fait. Mais j’ai fini par entendre parler de l’exploitation agricole de René Larrieu, qui cultivait peu de céréales encore moins de vaches à cornes. Parce qu’il avait trouvé l’Eldorado chez lui : il vivait au Miocène !

Figurez-vous que d’héritage en héritages, c’est chez lui qu’étaient situés les vieux fours à turquoise de Réaumur à en Baillasbats, commune de Simorre ! Sur son plan cadastral, un des lieux dits s’appelait Malartic, comme une sorte de Malicorne de Rives ! Faisant un trou (à la pioche) un jour pour forer un puits, il était tombé sur une dent. Forcément, il possédait le gisement ! Puis une autre, des dents en pierre énormes mais bien des dents, avec racines et par-dessus émail. Et puis des os. Et puis un jour des défenses, au diamètre dilaté, énormes : des mastodontes. Les mêmes qu'à Sansan où les avait trouvés Lartet !

J’ai le souvenir d’une grande maison comme elles le sont dans le Gers, entourée de bâtiments de terre comme c’était chez moi, des briques d’argiles beige renforcées de temps à autre de paille, empilées comme en Afrique. Toitures en tuiles romanes. Grandes pièces un peu délabrées à l’intérieur avec des armoires anciennes. Confort minimal, il y avait l’électricité et l’eau courante. Décoration absente.

Partout, des caisses empilées, de vieilles caisses dépareillées récupérées là où elles ne valaient rien. De temps à autre au milieu des pièces, des sortes de cercueils. Sur des tréteaux...! Entrer là-dedans était impressionnant… !

nous sommes à Malartic, -20 millions d'années
les hominidés sont sur la branche !

Au milieu de tout cela René Larrieu entassait ses découvertes et remplissait ses caisses : chaque année, il repérait un affleurement de sable, signal que dessous coulait la rivière fossilisée qui avait recueilli les restes de la faune de l’époque : le miocène c’est moins 20 millions d’années, pas n’importe quoi ! A l’époque, le climat était tropical, et mastodontes et autres rhinocéros batifolaient dans nos actuels champs de maïs. Dans les virages de la rivière (il fallait creuser un nouveau puits), on trouvait déposés les gros restes (lourds) des animaux morts à l’époque : crânes, fémurs et tibias, défenses notamment. Dans un trou creusé l’an d’après, on était dans une portion plus rapide de la rivière, et les dépôts étaient plus petits.

Les fouilles duraient depuis des années, les cercueils étaient de plus en plus pleins d’ossements de géants, et René accumulant les connaissances avait remonté le temps : il vivait au miocène, mais accueillait les scolaires à chaque vacance. Les gosses étaient émerveillés !

ça c'est un dinothérium : que des défenses en bas, pour labourer la terre

Je vous ai montré la dent qu’il m’a donnée, et je suis en train de tenter de retrouver sa trace, car lui et les scientifiques qui l’accompagnaient, Francis Duranton et Pascal Tassy notamment du Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse, sont aujourd’hui les experts les plus éminents de cette époque révolue, pleine d’ animaux étonnants, aujourd’hui disparus.

                                                     un cimetière de mastodontes !


(à suivre, on va finir par découvrir Odile)


un sabertooth cat...

ses dents rayent le parquet...!